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Interview groupée

Interview avec Alix, Camille et Gabrielle (+Paloma)

 

Pour planter le décor, j'étais en recherche de membres à interviewer et, en en voyant trois en train de discuter tranquillou billou dans la cabane, j'ai tenté ma chance : « Eh l'un d'entre vous accepterait de répondre à des questions pour le blog de l'école? ». Ce à quoi a répondu Camille le plus naturellement du monde : « On peut le faire tous ensemble ! ». J'ai trouvé que c'était une bonne idée, les filles aussi et on s'y est mis ! J'espère que vous vous y retrouverez dans cette joyeuse cacophonie et que à l'écrit ce sera compréhensible...

 

Margaux : C'est quoi la différence entre une école classique et une école démocratique ?

Alix : En fait, à l'école classique t'es toujours assis sur une chaise et puis t'écris comme ça ou tu fais les exercices qu'on te demande. Alors que à l'école démocratique, tu peux aller dans le jardin quand tu veux, jouer quand tu veux, tu peux faire tout ce que tu veux.

Margaux : Ok. Vous avez des choses à ajouter les autres ou bien on fait chacun une question ?

Gabrielle : Ceux qui veulent répondre le font. Bah déjà dans l'école publique on est pas libres de nos mouvements, quand on s'exprime, on ne peut pas s'exprimer beaucoup dans ces écoles. Mais dans l'école Respire on peut s'exprimer, on peut choisir ce qu'on veut faire pendant la journée. C'est la liberté. On se sent mieux. Et il y a plus de responsabilités. Et on peut apprendre en faisant des connaissances tout seuls. Enfin, il y a différentes sortes d'apprentissages et puis voilà.

Camille : Et dans une école classique, on nous impose des choses qu'on n'a pas forcément envie de faire et en plus on n'avance pas forcément à notre rythme parce qu'il y en a qui sont plus en difficulté que toi. Du coup, le maître ou la maîtresse, est obligé de rester souvent sur les mêmes choses et du coup on apprend souvent les mêmes choses. Et souvent, il y en a des plus avancés que toi et t'as pas le temps d'apprendre bien. Alors que là dans une école démocratique tu apprends à ton rythme. Et t'as pas quelqu'un qui t'impose ce que tu dois faire.

Margaux : D'accord. Et vous avez l'impression d'avoir appris des choses cette année ?

Camille : Moi déjà au début de l'année, ma mère me laissait pas cuisiner trop et là depuis le début de l'année j'ai beaucoup appris à cuisiner. J'ai appris à me servir d'un ordinateur.

Alix : Bah moi aussi j'ai appris à cuisiner. Avant je ne savais pas faire les pâtes et maintenant je sais faire.

Paloma : Moi je sais faire les pizzas.

Gabrielle : Moi des crêpes.

Camille : Moi depuis que je suis à cette école je m'exprime mieux avec les autres. Par exemple avant j'étais très pressé de parler. Des fois je devais retenir ma respiration, je disais tout d'affilée « bleblehgbh » comme ça. Maintenant je m'exprime mieux, beaucoup mieux. Je suis plus relax.

Gabrielle : Moi je suis plutôt stressée.

Margaux : T'es stressée ici ?

Gabrielle : Non ! Avant cette école on était stressés parce qu'on devait faire des évaluations, on était hyper stressés. Moi j'avais mes mains qui étaient mouillées parce que je transpirais des mains.

Margaux : Et du coup pour quelles raisons vous êtes dans cette école ?

Camille : Moi ça vient de Dorothée, c'est ma tante en fait, et elle en a parlé à ma mère, ma mère m'a proposé ça et m'a demandé si j'étais d'accord. J'ai dis oui et après on en a parlé avec mon père. Mon père était pas trop pour mais il était quand même d'accord.

Paloma : Quand ma mère me l'a proposé, la seule raison pour laquelle je ne voulais pas y aller c'est parce que j'avais des amis à mon école. Mais j'aimais pas l'école parce que nous il y avait des systèmes de croix. En fait si tu avais un trait c'était un avertissement et si tu avais une croix tu restais pendant la récréation et tu faisais toutes tes tables de multiplication de 2 à 9.

Alix : Moi pareil avec des couleurs : vert, orange et rouge. Si tu étais dans le rouge tu étais dans le préau et tu travaillais.

Camille : Moi il y avait noir aussi !

Paloma : Et souvent en plus les professeurs ils avaient leurs préférences sur les élèves. Moi j'étais à côté d'un garçon qui était super bavard et moi aussi je parle beaucoup. Et comme lui il travaille bien j'avais un trait quand on discutait alors que lui non.

Camille : Des fois les maîtres et maîtresses ils préfèrent ceux qui ne parlent pas beaucoup. Et aussi ceux qui arrivent le moins bien à travailler parce qu'ils leur portaient plus d'attention.

Gabrielle : En fait dans ces écoles on ne pouvait pas être nous-mêmes.

Tous : Ouais.

Paloma : Aussi comment tu t'habillais c'était toujours jugé et tout ça.

Tous : Oui.

Camille : Par exemple un jour Alix elle avait peur de porter un manteau parce qu'elle avait peur qu'on se moque parce qu'une fois , quand elle portait ce manteau, une fille avait dit un secret à l'oreille d'une amie en regardant Alix.

Gabrielle : Moi sur mon apparence aussi. En CE1 il y avait deux garçons, Gabin et Lucas, ils disaient que j'étais grosse, que j'avais de grosses cuisses et tout ça. C'était chiant.

Paloma : Ils disent n'importe quoi.

Margaux : Il y a plus de harcèlement dans une école classique?

Tous : Oui.

Margaux : Et ici vous trouvez qu'il y a pas trop de moqueries ?

Paloma : Baah si. Mais moins.

Alix : Il y en a mais moins.

Camille : Moi aussi j'avais une amie avec qui je voulais jouer et mais depuis qu'elle a sauté une classe, si je vais la voir je passe pour un gros débile.

Paloma : Parce que tu n'es pas à son niveau c'est ça ?

Camille : Oui. Et ses amis de sa classe ils ne voulaient pas que je vienne.

Alix : Ici au moins on peut être avec qui on veut.

Camille : Aussi souvent, il y a des groupes qui se forment et ils excluent une personne et tous les autres sont ensemble. Et ça c'est super énervant. C'était toujours le plus fort, le plus beau gosse et tout. Et quand tu te fâches avec le plus populaire, tous les autres sont contre toi.

Alix : Ils se croient supérieurs aux autres.

Paloma : Quand tu te fâches avec quelqu'un et que cette personne c'est la meilleure de la classe et tout cela, tout le monde l'adore eh bien il y a tout le monde qui te fait la tête.

Camille : Et aussi quand tu travailles c'est tout le temps de la concurrence. Et quand t'es le moins bon tout le monde se moque de toi. Ici à l’école on est souvent appelé à aider les gens. Par exemple quand il y a deux petits qui se cherchent eh beh, Marin vu que c'est un garçon j'ai l'impression qu'il se sent supérieur à Suzanne qui est une fille. Et du coup il se sent capable de la taper alors moi je les aide à régler leurs problèmes.

Gabrielle : Il y a d'autres questions ?

Margaux : Oui. Alors, est-ce qu'il y a eu un effet sur vos familles depuis votre année à l'école Respire ?

Camille : Moi vu que c'est mes parents qui on choisi de nous mettre dans l'école beh les grand-parents ils ne comprennent pas trop le sens de l'école. Ma grand-mère elle me pose toujours des questions. Par exemple : « Beh alors, qu'est-ce que tu as fait aujourd'hui ». Je lui dit ce que j'ai fait. Et elle me dit : « Beh ? T'as pas appris ? ». Elle est tellement dans le parcours scolaire classique qu'elle arrive pas à comprendre le sens de l'école démocratique. Elle est souvent dans la négativité parce qu'elle ne comprends pas trop. Souvent les adultes quand ils ne comprennent pas ils sont négatifs et ils en font qu'à leur tête.

Alix : Notre papy en fait il dit « Mais cette école elle ne t'apprend pas, elle est nulle. C'est bien tu vas aller dans une autre école où il y aura des règles au moins. ». Il comprend pas qu'il y a des règles ici aussi, elles sont seulement différentes.

Camille : C'est parce que eux ils sont allés dans ces écoles et ils n'ont pas envie que ça change.

Gabrielle : Moi ma grand-mère maternelle elle est plus ouverte. Mon grand-père était pas trop d'accord que je vienne dans cette école je crois mais ça a changé.

Margaux : Et dans votre famille proche, vous avez vu des changements ?

Gabrielle : Eh bien par exemple chez moi je suis plus responsable. Je fais le ménage dans ma chambre et j'aide ma mère plus souvent.

Camille : Moi je fais plus le ménage et je fais la cuisine des fois, mais c'est assez simple. Mais avant je ne faisais pas du tout la cuisine.

Margaux : Et aux gens qui disent que dans cette école vous apprenez rien, vous avez envie de leur répondre quoi ?

Paloma : En fait dans cette école on peut apprendre si on veut ou pas. C'est nous, c'est notre avenir, ce sont nos décisions. Et tu peux avancer beaucoup plus vite parce que tu peux avancer à ton rythme.

Camille : On apprend beaucoup plus dans cette école que dans les autres écoles.

Margaux : D'accord. Et sur une échelle de 1 à 10, quelle est votre envie de revenir à l'école Respire l'année prochaine ?

Paloma : 8. Parce que c'est surtout les comportements de certaines personnes qui m’énervent.

Camille : Moi 7. Parce que en fait c'est vrai que ma mère elle me parle des ordinateurs. Elle trouve que j'en fais beaucoup. Je pense que ce matin on a eu une discussion avec mon ami Louis comme quoi lui disait que moi j'en faisais pas trop. Et ma mère elle trouve que j'en fais trop. Donc je ne sais pas vraiment qui a raison parce que Louis aussi il en fait pas mal, et du coup ça me tracasse un peu. Elle me dit que si je ne fais que ça de ma journée, eh bien j'apprendrais presque rien et que plus tard ce sera difficile pour moi de choisir un métier.

Margaux : Mhh du coup ça te tracasse ?

Camille : Oui. Du coup je ne sais pas trop si c'est bien. Avant il y avait une journée sans écrans qui était le lundi. Moi j'aimerais proposer au Conseil d’École deux journées sans écrans parce que déjà à l'époque l'école vivait beaucoup plus les jours sans écrans. Sur l'écran c'est pas toi qui vit c'est l'écran qui dirige.

Margaux : Peut-être aussi que c'est en faisant des excès qu'on prend conscience de ses limites.

 

Camille : Oui c'est ce que j'ai dit : « Peut-être que l'année prochaine j'en ferai moins parce que j'aurai compris ».  

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